Peinter

Emmanuel Van der Meulen

Emmanuel Van der Meulen

2012-2013
2012-2013

Emmanuel Van der Meulen
Period: 2012-2013
Profession: Peinter « De ça, de là, en haut, en bas, courant, jamais [l’eau] ne connaît la quiétude, pas plus dans sa course que dans sa nature ; elle n’a rien à soi, mais s’empare de tout, empruntant autant de natures diverses que sont divers les endroits traversés, comme le miroir accueille en soi autant d’images qu’il y a d’objets passant devant lui. » Léonard de Vinci, Carnet (C.A 171 r.a) « La question de la peinture n’appartient ni d’abord, ni uniquement aux peintres, moins encore aux seuls esthéticiens. Elle appartient à la visibilité elle-même, donc à tous – à la sensation commune. » Jean-Luc Marion,
La croisée du visible « Sur une photographie célèbre datant de 1968, on voit Walter De Maria qui pose sur une route bitumée, les jambes écartées de part et d’autre d’une ligne blanche continue et les bras relevés en deux lignes parallèles à celles des bords de la ligne au sol. Cette image appelle une œuvre célèbre de l’artiste américain, conçue la même année : les lignes de craie de
Mile-Long Drawing in the Desert, tracées avec un camion de marquage dans le désert de Mojave. Par ces gestes, Walter De Maria signifiait que le matériau « sol » et la mesure « ligne », qui permettent partout sur terre d’identifier un morceau de terrain, étaient désormais le nécessaire et suffisant présupposé de la sculpture. On retrouve des éléments similaires dans les peintures d’Emmanuel Van der Meulen : une surface (l’aplat central) et des lignes (les bandes de couleur). On peut donc avancer l’hypothèse que la surface (peinte) et son marquage (coloré) sont pour Emmanuel Van der Meulen le nécessaire et suffisant présupposé de la peinture. Je continue le parallèle. En remplissant une galerie de terre pour son exposition
50 m3 Level Dirt , Walter De Maria amena le matériau brut – pure saleté, pure terre, pur sol – au centre de la sculpture, et invita le spectateur à envisager la terre comme une proposition à laquelle il avait tout simplement à acquiescer pour accéder à la jouissance esthétique, étant entendu que la terre n’était pas là seulement pour être vue, mais aussi pour donner à penser. De la même façon, Emmanuel Van der Meulen interroge la peinture – pure couleur, pure surface, pure épaisseur, – dans l’espace du tableau. Ce faisant, il propose au spectateur d’aller au-delà de la reconnaissance de ce qu’il y a à voir sur le tableau et d’en venir à l’expérience de la peinture proprement dite (« le tableau comme expérience du visible »).  Les variations qui ont lieu d’une œuvre à l’autre – légères mais effectives – servent à réenclencher l’acte de voir à chaque tableau. Et dans cet acte de voir se mêlent délectation esthétique et pensée de la peinture. Je continue le parallèle. Dans l’exposition
Earth Works à la galerie new-yorkaise Virginia Dawn, en 1968, Walter De Maria présenta une grande toile peinte en jaune, au milieu de laquelle se trouvait un panneau métallique avec l’inscription : « The Color Men Choose When They Attack The Earth ». Il s’agissait de la couleur des machines de construction. On peut émettre l’hypothèse que le travail de la couleur chez Emmanuel Vander Meulen procède de cette même volonté, bien que menée en sens inverse et signifiée de façon plus abstraite, de confronter ce qui relève de la nature et ce qui relève de l’action de l’homme. Ou, pour le dire autrement, de confronter ce qui relève des caractères intrinsèques de la peinture et ce qui relève de son histoire, ce qui relève de sa matérialité et ce qui relève de sa conceptualisation. Il y a dans la peinture d’Emmanuel Van der Meulen une présence réelle, bien que secrète, des matériaux bruts, naturels, mouvants : les cieux, les eaux, les sols, mais aussi les murs et les routes. Ceux-ci, ou du moins quelques-unes de leurs caractéristiques, sont étudiés dans leur moindre variations. Simplement, il ne s’agit pas d’une étude directe, mais d’une approche par analogie, à travers l’étude des caractéristiques de l’un de leurs équivalents en peinture : la couleur posée sur la surface. » Extrait du texte de Sophie Kaplan,
La couleur, comme la boue et comme l’eau, change toujours un peu en séchant, publié dans le catalogue
Chronochromie édité en 2009 à l’occasion d’une exposition personnelle à la galerieJean Fournier.

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