Hommage aux poètes Édouard Glissant et Andrea Zanzotto

L’Académie de France à Rome – Villa Médicis s’associe au Teatro Valle pour une soirée d’hommage aux poètes Édouard Glissant et Andrea Zanzotto Après avoir été menacé de fermeture et de mise en vente, le Teatro Valle, haut lieu de la culture romaine, est depuis l’été 2011 occupé par des travailleurs du spectacle. La défense de la culture n’a jamais été aussi vive et généreuse que dans ce théâtre à l’italienne où sont donnés tous les soirs des spectacles gratuits et ouverts à tous. La poésie qui est affaire de don, ne pouvait dès lors trouver meilleur lieu pour permettre cette rencontre. Pour le Martiniquais Édouard Glissant, poète décédé en février 2011, défenseur d’une identité multiple « au carrefour de soi et des autres », comme pour le Trévisan Andrea Zanzotto, poète mort en octobre 2011, qui criait « Mais que m’importent désormais les idiomes ? », la langue est affaire de mélanges, de partages et de métissages. Anne Consigny et Maddalena Crippa donneront leurs voix aux poètes et incarneront leurs textes-partitions sur la scène et dans les travées du Teatro Valle.  Les deux grandes comédiennes seront entourées par des membres du Teatro Valle et des pensionnaires de la Villa Médicis (Philippe Artières, écrivain et chercheur, Joana Barreto, historienne de l’art, Céline Bonnot-Diconne, restauratrice, Juan Pablo Carreño, compositeur, Caroline Deruas, cinéaste, Catherine Libert, cinéaste, Malik Mezzadri, compositeur, Eric Pagliano, historien de l’art) qui liront des textes choisis par leurs soins, formant comme des lignes reliant ces deux imaginaires. Le souffle des poètes toujours demeure, la littérature est faite pour être entendue partout et par tous, c’est la raison de cette association exceptionnelle entre deux institutions, le temps d’un partage d’un soir en forme d’hommage. Édouard Glissant Édouard Glissant est né en 1928 à Sainte-Marie en Martinique. Après avoir suivi à Paris une formation supérieure en ethnologie et philosophie menée parallèlement à ses travaux d’écriture, critique et littéraire, Glissant s’engage dans les luttes anticoloniales aux côtés de Franz Fanon et Paul Niger. Cet engagement lui vaut une interdiction de séjour aux Antilles et une assignation à résidence en France métropolitaine pour avoir fondé le Front Antillo-Guyanais pour l’Autonomie. De retour en Martinique en 1965, il y fonde l’Institut martiniquais d’études et la revue Acoma . Au début des années 1980, il devient directeur du Courier de l’Unesco , puis part enseigner aux États-Unis, d’abord en Louisiane puis à New York. Durant les dernières années de sa vie, il fonde l’Institut du Tout-Monde. Après avoir été formé aux thèses de la négritude développé par son professeur Aimé Césaire, il développe ensuite dans ses oeuvres le concept de créolisation qui le conduisent à proposer notamment deux directions dans ses travaux : la mondialité, « face humaine de la mondialisation » et plus tard le Tout-monde, questionnement de l’universalité et des identités au contact du divers. Son œuvre complexe où s’entremêlent romans (dont La Lézarde , prix Renaudot en 1958, puis le Quatrième siècle jusqu’à La Cohée du Lamentin ), poésies (avec notamment Les Indes , son grand poème sur la conquête), pièce de théâtre ( la Case du Commandeur ) et essais et traités philosophiques (de Soleil de la conscience au Traité du tout-monde ) est aujourd’hui reconnu comme l’une des voix les plus singulière de la littérature mondiale. Le dernier livre que Glissant publia de son vivant est une anthologie poétique du Tout-monde intitulé La terre le Feu l’Eau et les Vents qui rassemble des textes d’une grande diversité – de Freud à Parménide, de Cendrars aux Épopées Bambara. Anne Consigny Comédienne En 1980, alors qu’elle vient de sortir première du Conservatoire national de Paris à 17 ans, Peter Brook l’engage dans La Cerisaie au Théâtre des Bouffes du Nord, avec Michel Piccoli. Elle entre l’année suivante à la Comédie-Française, où elle reste pensionnaire pendant 3 ans. En 1984, elle donne sa démission. Elle est engagée par Manoel de Oliveira pour tourner le film de la pièce de Paul Claudel Le Soulier de Satin et monte Père de Strindberg à Lisbonne. De retour à Paris elle joue notamment Hot House de Harold Pinter auprès de Michel Bouquet.En 1996, elle est rappelée sur les planches par Brigitte Jacques qui l’invite à une création de Sertorius de Corneille au Théâtre de la Commune à Aubervilliers. Elle enchaînera ensuite jusqu’en 2004 les créations de rôles sur les scènes parisiennes. En 2005, Stéphane Brizé lui offre son premier rôle principal au cinéma dans un long métrage : Je ne suis pas là pour être aimé. Les propositions de longs métrages s’enchaînent. Julian Schnabel fait appel à elle pour Le Scaphandre et le Papillon , Arnaud Desplechin pour Le Conte de Noël . Enfin Alain Resnais, pour Les Herbes Folles et son prochain long métrage qui sortira en avril 2012 : Vous n’avez encore rien vu . Andrea Zanzotto Le poète, traducteur et essayiste Andrea Zanzotto est né, a toujours vécu et est mort dans la région de Trévise. Son écriture est marquée par sa marginalité géographique et linguistique qui le conduit à pratiquer son dialecte et à inventer nombre de néologismes. Pier Paolo Pasolini le remarque dès 1957 avec la parution de Vocativo et parle chez lui d’un « droit à un délicat délire ». Cette qualité le conduit à travailler avec Federico Fellini  pour Casanova , La Cité des Femmes ou encore E la nave va . Sa langue, faite d’inventions et de réinventions tant sémantiques que syntaxiques, sert un travail riche de descriptions. Le critique est écrivain René de Ceccatty dit à propos de Zanzotto : « Calembours, mots-valise, calligrammes, graffiti, sigles, usages insolites de termes savants, syntaxes désarticulées contrastent avec des descriptions bouleversantes d’états mentaux à la limite de la psychose ou avec de simples rêveries sur des paysages lunaires ou de touchantes évocations de la vie paysanne. » Zanzotto ne s’en tient cependant pas à la fantaisie poétique, il est également l’auteur d’essais tels que ses Essais critiques , témoignages de ses lectures allant de Joseph Conrad à Jacques Lacan et de proses telles que Au-delà de la brûlante chaleur . Zanzotto savait la difficulté de lecture propre à sa poésie, il parlait ainsi de son style comme d’une « réalité filée mais compacte, sans rien au centre, qui serait toutefois un néant ‘infiniment défini’ ». Maddalena Crippa Comédienne Maddalena Crippa débute à 17 ans avec la compagnie du Piccolo Teatro de Milan. Elle commence sa carrière de comédienne en travaillant avec Giorgio Strehler et Peter Stein. Son parcours au théâtre est associé aux plus grands : Luigi Diberti, Anna Maestri, Achille Millo, Elisabetta Pozzi, Didi Perego, Pamela Villoresi, Giulio Scarpati et Ferruccio Soleri, passant de Il Campiello de Goldoni (1975) au Triomphe de l’amour (1985) de Marivaux et s’imposant comme l’une des actrices les plus importantes de la scène internationale. Elle incarne Lady Macbeth dans la célèbre tragédie de Shakespeare dirigée par Marcucci en 1980, puis elle est la protagoniste de La commedia della seduzione de Goldoni dirigée par Luca Ronconi. Elle joue également dans Phèdre (1988-1993), Titus Andronicus de Shakespeare, Une maison de poupée d’Ibsen, Oncle Vania de Tchekhov, Pierrot Lunaire de Schönberg, ou encore Jedermann d’Hofmannsthal. Entre la tragédie classique et moderne, Maddalena Crippa expérimente un large éventail d’expressions théâtrales. Dans le même temps, elle travaille également pour la télévision en participant aux fictions Aut Aut – Cronaca di una rapina (1976) de Silvio Maestranzi ou Sonia Gessner et Arabella (1980) de Salvatore Nocita. Elle prête sa voix au poète Paul Celan en 2009 à Rome. La même année, elle incarne Varvara Petrovna dans Les Démons de Dostoïevski mis en scène par Peter Stein. Par ailleurs, son travail sur la voix l’a menée à faire du chant un moyen d’expression. En 2001 elle joue et chante dans Sboom , spectacle mis en scène par Cristina Pezzoli qui montre les illusions et les désenchantements des années 1960 avec des chansons de Paolo Conte ou Fabrizio De André entre autres et des textes de Pasolini ou bien encore Boatti. Dans cette même lignée, elle participe en 2008 aux cycles poésie et musique de l’Auditorium de Rome dans Pasolini – Morante sur des compositions de Paolo Schianchi. Teatro Valle | 21h00 | entrée libre Anne Consigny et Maddalena Crippa Via del Teatro Valle, 21 – Rome Pour infos : Antoine Beauchamp [email protected]

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